Examen régional : Académie de Oujda_Angad (session : Juin 2011)
Texte :
Mon père me parlait du Paradis. Mais, pour y renaître, il fallait d'abord mourir. Mon père ajoutait que se tuer était un grand péché, un péché qui interdisait l'accès à ce royaume. Alors, je n'avais qu'une solution : attendre ! Attendre de devenir un homme, attendre de mourir pour renaître au bord du fleuve Salsabil. Attendre ! C'est cela exister. À cette idée, je n'éprouvais certainement aucune frayeur. Je me réveillais le matin, je faisais ce qu'on me disait de faire. Le soir, le soleil disparaissait et je revenais m'endormir pour recommencer le lendemain. Je savais qu'une journée s'ajoutait à une autre, je savais que les jours faisaient des mois, que les mois devenaient des saisons, et les saisons l'année. J'ai six ans, l'année prochaine j'en aurai sept et puis huit, neuf et dix. À dix ans, on est presque un homme. À dix ans, on parcourt seul tout le quartier, on discute avec les marchands, on sait écrire, au moins son nom, on peut consulter une voyante sur son avenir, apprendre des mots magiques, composer des talismans.
En attendant, j'étais seul au milieu d'un grouillement de têtes rasées, de nez humides, dans un vertige de vociférations de versets sacrés.
L'école était à la porte de Derb Noualla. Le fqih, un grand maigre à barbe noire, dont les yeux lançaient constamment des flammes de colère, habitait la rue Jiaf. Je connaissais cette rue. Je savais qu'au fond d'un boyau noir et humide, s'ouvrait une porte basse d'où s'échappait, toute la journée, un brouhaha continu de voix de femmes et de pleurs d'enfants. La première fois que j’avais entendu ce bruit, j’avais éclaté en sanglots parce que j’avais reconnu les voix de l’Enfer telles que mon père les évoqua un soir.
Ma mère me calma :
-Je t'emmène prendre un bain, je te promets une orange et un œuf dur et tu trouves le moyen de braire comme un âne !
Toujours hoquetant, je répondis :
-Je ne veux pas aller en Enfer.
Elle leva les yeux au ciel et se tut, confondue par tant de niaiserie.
La Boîte à merveilles, Ahmed Sefrioui Éditions du Seuil ; 1954, pp.10-11
I. ÉTUDE DE TEXTE (10 points)
1) Répondez aux questions suivantes à partir de votre lecture de « La Boîte à Merveilles »:
a) Placez chacun des noms suivants dans la case qui convient : (1 pt)
Maalem Abdeslem- Lalla Zoubida- Fatma Bziouya- Sidi Mohammed.
Le personnage principal :
Son père :
Sa mère :
Une voisine :
b) Parmi les affirmations suivantes, une seule est vraie, laquelle ? Recopiez-la (0,5pt)
-Le narrateur a deux frères.
- Le narrateur a un frère et une sœur.
-Le narrateur n’a ni frère, ni sœur.
c) Quel est le métier de son père ? (0,5 pt)
2) Relevez dans le premier paragraphe deux mots qui reprennent « Paradis ». (1 pt)
3) « Alors, je n’avais qu’une solution : attendre »
a) Quelle est l’autre solution écartée par le père ? (0,5 pt)
b) Pourquoi cette solution est-elle rejetée ? (0,5 pt)
4) « J’avais six ans »
a) Combien le narrateur doit-il attendre pour devenir « presque un homme » ? (0,5 pt)
b) Que rêve-t-il de faire quand il sera « presque un homme » ? (0,5 pt)
5) Le narrateur fait-il une description valorisante ou dévalorisante du fqih? (1 pt)
6) « La première fois que j’avais entendu ce bruit… » .
a) De quel bruit s’agit-il ? (0,5 pt)
b) Ce bruit, qu’évoque t-il pour le narrateur ? (0,5 pt)
7) « tu trouves le moyen de braire comme un âne ».
a) Identifiez la figure de style dans cet énoncé. (0,5 pt)
b) Sur quoi la mère veut-elle insister en employant cette figure de style ? (0,5 pt)
« Elle leva les yeux au ciel… »
D’après-vous, pourquoi la mère lève-t-elle les yeux au ciel ? (1 pt)
9) Le verbe attendre est répété plusieurs fois dans ce texte.
Pourquoi cette répétition à votre avis ? (1 pt)